24 April 2013

Culpabilisée, l’Europe diabolise Israël

Culpabilisée, l’Europe diabolise Israël

 
lundi 22 avril 2013, par Manfred Gerstenfeld
Au moins 150 millions d’Européens perçoivent Israël comme animé d’intentions maléfiques.
Ce sont les résultats d’une étude de l’Université de Bielefeld, publiée en 2011, à la demande de la Fondation allemande, sociale et démocratique Freidrich Ebert.
En dépit de ces découvertes scandaleuses, ce rapport n’a guère capté la moindre attention, où que ce soit.
Cette enquête s’est déroulée dans sept pays européens.
Les chercheurs ont sondé les gens pour savoir s’ils pensaient qu’Israël se livre à une guerre d’extermination contre les Palestiniens.
Les pourcentages les plus faibles de ceux en accord avec cette proposition se trouvent en Italie et aux Pays-Bas, avec un taux légèrement au-dessus de 40%.
L’Angleterre, l’Allemagne, le Portugal et la Hongrie se situaient tous entre 40 et 50%.
En Pologne, la configuration atteignait 63%.
Une étude du Centre sur la Shoah de Norvège posait la question d’une façon quelque peu différente : « Les Israéliens se comportent-ils comme les Nazis ? ». Trente-huit pour cent de ceux interrogés ont répondu : « Oui ».
L’accusation selon laquelle Israël est en train d’exterminer les Palestiniens relève d’une calomnie criminelle.
Au cours des deux années allant de la fin 1941 à la fin 1943, seulement dans les camps d’extermination de Treblinka, Belzec et Sobibor, 2 millions de Juifs ont été assassinés par les Allemands.
Les moyens technologiques ont grandement « évolué » depuis lors.
Si l’accusation génocidaire avait la moindre once de vérité, on aurait fini d’exécuter les derniers enfants et adultes palestiniens, il y a belle lurette !
Pourtant le nombre de Palestiniens a continué d’augmenter considérablement, tout au long de ces dernières décennies.
Des enfants palestiniens voient le jour dans des hôpitaux israéliens et ceux qui sont malades sont soignés par des médecins israéliens.
Les découvertes de ces deux études apportent un éclairage saisissant sur l’image qu’un grand nombre d’Européens entretiennent de l’Etat Juif comme étant, nécessairement, malveillant et extrémiste.
Elles évoquent l’antisémitisme le plus grave des deux derniers millénaires passés.
Aux premiers siècles de la Chrétienté, fut lancée la fausse accusation, disant que les Juifs avaient commis un déicide, en tuant le prétendu fils de D.ieu.
A cette époque, on n’aurait pas pu imaginer un crime plus grand.
Des Juifs, identifiables comme tels, vivant dans certains pays européens m’ont raconté que, même de nos jours, des gens les abordent parfois pour leur dire : « Vous avez tué Jésus ».
La sécularisation n’a cessé de se poursuivre, après le siècle des Lumières. De ce fait, les symboles du Mal Absolu ont aussi subi une mutation. Au sein d’Etats fortement nationalistes, on a commencé à considérer d’autres groupes ethniques comme inférieurs.
Dans l’Allemagne nazie, cette vision a été portée à son paroxysme : les Juifs ont été totalement déshumanisés et définis comme « sous-hommes » « vermine », ou « bactéries ».
A nouveau, ils incarnaient le « Mal Absolu », de la façon dont ils étaient perçus à cette époque et cela a mené à la Shoah et au génocide des Juifs.
La représentation du Mal Absolu a encore changé dans le monde occidental, après la Seconde Guerre Mondiale.
Il s’est transformé en soupçon de commettre un génocide et de se comporter comme les Nazis.
Les deux études mentionnées précédemment montrent qu’une minorité très consistante d’Européens porte ce type de regard sur Israël.

L’étude ne couvre pas tous les pays européens, cela dit, on peut considérer qu’elle reste représentative.
Avec une vision aussi diabolisée de l’Etat Juif, un vaste nombre d’Européens a, ainsi, ranimé un état d’esprit antisémite qui semble surgi du Moyen-Âge.
Il y a, probablement, autant d’Européens contaminés par ces opinions profondément erronées qu’il existait d’antisémites en Europe avant qu’Hitler ne parvienne au pouvoir.
Cette vision radicale d’Israël reste encore latente.
Pourtant, elle s’exprime aussi à travers les incidents antisémites et anti-israéliens.
Cela dit, ce qui demeure souterrain pourrait exploser à l’avenir, tout comme cela s’est produit auparavant.

La question cruciale subsiste : d’où provient ce point de vue diabolisant ? Trois facteurs, au moins, ont, graduellement, contribué à son apparition.
Le premier correspond à la méthode de délégitimation à « petit feu ».
Elle consiste à publier, aussi fréquemment que possible des nouvelles négatives au sujet d’Israël.
Elle est instaurée par des mensonges répétitifs, de fausses accusations, la fabrication de « meurtres rituels », d’articles bourrés de distorsions et de préjugés, de condamnations officielles et ainsi de suite.
La télévision, d’autres medias, des hommes politiques et d’anciens politiciens, certains dirigeants d’Eglise, de nombreuses ONG humanitaires politisées, des universitaires, autant que des Juifs et Israéliens animés par la haine de soi, ont tous, à un degré ou un autre, contribué à cet état de fait.
Cela s’ajoute au façonnement de cette opinion extrêmement malveillante envers Israël.
Les nouvelles positives en provenance d’Israël sont souvent occultées par les médias.
En noircissant l’image d’Israël, les sentiments de culpabilité relatifs à la collaboration avec les Nazis et à l’échec de beaucoup de représentants des autorités et de destins individuels, durant la Shoah, peuvent, ainsi, être réprimés, refoulés.
Le second point réside dans l’attention réduite accordée à l’énorme taux de criminalité et au très haut degré d’incitation à la haine qui se propagent dans de vastes secteurs de la société palestinienne et de nombreux Etats arabo-musulmans.
Si les massacres de masse, les attaques terroristes et d’autres crimes fondamentaux bénéficiaient d’un éclairage proportionnel à la taille de la population et à la hauteur des fautes commises dans ces pays, les nouvelles concernant Israël resteraient comparativement négligeables.
En même temps, les Etats Européens n’ont pas été à la hauteur de leurs engagements, dans le cadre de la Convention de l’ONU sur le Génocide, d’envoyer devant un Tribunal International des planificateurs musulmans de génocide, tels que l’Iran et le Hamas.
Le troisième facteur qui a contribué à la délégitimation d’Israël c’est la minimisation de sinistres évènements s’étant déroulés, dans le propre passé des pays européens.
De cette façon, on dépeint une image bien plus rose de l’histoire de cette société, qui est ensuite comparée au portrait excessivement malmené et déprécié d’Israël.
La question subsiste, par conséquent, de savoir s’il n’y a uniquement que le fait que des désastres s’abattent sur Israël qui puissent encore ouvrir les yeux des peuples ou s’il y a quoi que ce soit d’autre qu’on puisse faire pour combattre cette tendance ?

Le Dr. Manfred Gerstenfeld est membre du Conseil d’Administration du Centre des Affaires Publiques de Jérusalem, qu’il a présidé pendant 12 ans. Il a publié 20 ouvrages.
Plusieurs d’entre eux traitent d’anti-israélisme et d’antisémitisme.

 


 
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